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Au Soudan, la population, déjà affaiblie par la guerre qui dure depuis plus de deux ans, est confrontée à la pire épidémie de choléra que le pays ait connu depuis des années. Déclarée il y a un an par le ministère de la Santé, l’épidémie avait déjà causé plus de 2 470 décès et près de 99 700 cas suspects le 11 août 2025. Rien que dans la région du Darfour, les équipes de Médecins Sans Frontières (MSF) ont traité plus de 2 300 patients atteints de choléra en un mois et enregistré 40 décès au cours de la semaine dernière, dans des établissements gérés par le ministère de la Santé.
Dans tout le Darfour, le choléra touche des populations déjà confrontées à de graves pénuries d’eau, rendant impossible le respect des mesures d’hygiène essentielles, telles que le lavage de la vaisselle et des aliments. La situation est particulièrement critique à Tawila, dans l’État du Darfour du Nord, où 380 000 personnes ont fui les combats qui se poursuivent autour de la ville assiégée d’El Fasher, selon les Nations unies. Le centre de traitement du choléra de l’hôpital de Tawila, doté officiellement de 130 lits, a accueilli 400 patients durant la première semaine d’août. Face à la saturation de l’établissement, le personnel a installé des matelas à même le sol pour répondre à l’urgence.
À Tawila, les habitants survivent avec une moyenne de seulement trois litres d’eau par jour, moins de la moitié du seuil minimum d’urgence fixé par l’OMS à 7,5 litres par personne pour boire, cuisiner et se laver. Alors que les cas de choléra continuent d’augmenter et que les ressources s’épuisent, la mise en place urgente de services d’approvisionnement en eau potable et d’assainissement est essentielle pour prévenir de nouveaux décès.
« Dans les camps de déplacés et de réfugiés, les familles n’ont souvent d’autre choix que de boire de l’eau contaminée, ce qui entraîne de nombreux cas de choléra », explique Sylvain Penicaud, coordinateur de projet MSF à Tawila. « Il y a deux semaines, un corps a été retrouvé dans un puits situé à l’intérieur d’un des camps. Le corps a été retiré et deux jours plus tard, les habitants ont dû se résoudre à boire à nouveau l’eau de ce puits. »
À environ 100 kilomètres de Tawila, un premier cas de choléra a été signalé à Golo, dans l’État du Darfour-Central, le 13 juillet. MSF a ensuite ouvert un centre de traitement du choléra de 73 lits à l’hôpital de Golo. Ce centre a rapidement été submergé, accueillant 137 patients pour la seule journée du 3 août. Cinq points de réhydratation orale ont été mis en place autour de Golo, afin de prévenir l’aggravation de l’état des patients. Malgré ces efforts, nos équipes constatent une propagation rapide de l’épidémie. Début août, le choléra a atteint Zalingei et Rokero, dans l’État du Darfour-central, ainsi que Sortony, dans l’État du Darfour du Nord.
Les fortes pluies aggravent la crise en contaminant l’eau et en endommageant les systèmes d’égouts. Le nombre de cas continue d’augmenter dans l’État du Darfour du Sud, où MSF, en coordination avec le ministère de la Santé, a augmenté la capacité du centre de traitement du choléra de Nyala à 80 lits. Sur place, les équipes attendent des vaccins et font face à une grave pénurie de comprimés pour purifier l’eau.
« Les centres de santé sont débordés », explique Samia Dahab, résidente du camp de déplacés d’Otash à Nyala. « Certaines zones ont de l’eau, d’autres ont des points d’eau qui sont éloignés ou à sec. Une partie de l’eau est salée, et nous la buvons sans la faire bouillir, sans savoir si elle est réellement potable. »
Alors que les populations fuient les combats, le choléra continue de se propager au Soudan ainsi que dans les pays voisins, le Tchad et le Soudan du Sud. À Damazin, dans l’État du Nil Bleu, MSF et le ministère de la Santé ont augmenté la capacité du centre de traitement du choléra de l’hôpital local de 50 à 250 lits en juillet, afin de faire face à l’afflux de rapatriés en provenance du Soudan du Sud. Dans ce centre, les équipes de MSF constatent une combinaison mortelle de choléra et de malnutrition. Entre le 3 et le 9 août, six patients décédés souffraient à la fois de choléra et de malnutrition aiguë.
« La situation est plus qu’urgente », déclare Tuna Turkmen, chef de mission de MSF au Soudan. « L’épidémie ne se limite plus aux camps de déplacés : elle s’étend désormais à de nombreuses localités dans les États du Darfour et au-delà. »
« La réponse internationale doit reposer sur des actions d’urgence coordonnées pour fournir des soins, améliorer l’accès à l’eau potable et aux services d’assainissement, et déployer des campagnes de vaccination contre le choléra dans les zones touchées, à un rythme adapté à l’urgence de la situation », poursuit Tuna Turkmen. « Chaque jour de retard coûte des vies. MSF est prête à collaborer avec le ministère de la Santé, l’UNICEF et l’OMS pour lancer des campagnes de vaccination de masse dans tout le Darfour. »
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