Dans les villages de l’intérieur aride de l’Érythrée, le changement s’opère. Là où les rivières saisonnières débordaient et disparaissaient sans laisser de traces, des barrages construits à la main retiennent aujourd’hui une eau précieuse. Les canaux d’irrigation alimentent les cultures même pendant les mois secs.
L’Érythrée, l’un des pays de la Corne de l’Afrique les plus exposés à la sécheresse, a adopté une approche simple pour faire face à la pénurie d’eau : la construction de barrages, e de petites structures en maçonnerie construites avec des matériaux locaux par les communautés.
Grâce à l’assistance technique et au financement concessionnel de la Banque africaine de développement, l’Érythrée a construit ou remis en état plus de 880 de ces petits barrages, la plupart dans des zones rurales mal desservies. En conséquence, les communautés qui ont longtemps été tributaires de précipitations irrégulières envisagent désormais l’avenir avec une confiance et un enthousiasme renouvelé.
Bekit Idris se souvient d’une vie marquée par des craintes constantes de pénurie alimentaire et de malnutrition avant qu’un barrage ne soit construit près de sa région natale de Guritata, dans le centre de l’Érythrée. « Nos récoltes dépendaient de la pluie, explique-t-il. Les pluies étaient devenues de plus en plus irrégulières et inégalement réparties, mais grâce au projet, j’ai pu cultiver des terres en aval du barrage ». Bekit Idris cultive désormais des céréales, des légumes, des fruits et du fourrage vert pour nourrir le bétail.
« Je récolte maintenant trois fois par an, alors qu’auparavant je ne récoltais qu’une fois par an, poursuit Bekit Idris. Avant la construction du barrage, notre production alimentaire suffisait à peine à nos besoins… Aujourd’hui, je produis suffisamment non seulement pour nourrir ma famille, mais aussi pour vendre au marché. Cela a grandement amélioré notre nutrition et le revenu de notre ménage. »
Depuis 2015, la Banque africaine de développement soutient cet effort par le biais du Programme de résilience à la sécheresse et de moyens de subsistance durables, qui vise à réduire la vulnérabilité dans la Corne de l’Afrique. En Érythrée, le projet a financé la construction de 98 barrages de petite et moyenne taille et de 11 points d’eau connexes. Il a également permis de réhabiliter plus de 200 hectares de terres dégradées.
L’amélioration de la disponibilité de l’eau n’est qu’un des résultats tangibles. En outre, le projet a permis aux communautés de passer d’une agriculture de subsistance à des pratiques agricoles plus durables et commerciales, améliorant ainsi la sécurité alimentaire et les moyens de subsistance dans tout le pays.
Le projet vise à construire plus de 116 barrages en maçonnerie pour soutenir l’agriculture irriguée. Les barrages ont une capacité allant de 30 000 m³ à plus de 110 000 m³, ce qui permet aux agriculteurs locaux des zones ciblées du centre, du sud et du nord de l’Érythrée de produire des quantités substantielles de légumes et de céréales.
Le projet a également encouragé la formation à de nouvelles compétences et la promotion de l’esprit d’entreprise afin de stimuler le développement global de la chaîne de valeur. En outre, le programme fournit aux agriculteurs différents types d’intrants agricoles qui leur permettent d’améliorer la production et d’augmenter la productivité par unité de surface.
Les communautés soutenues considèrent l’initiative comme un pas en avant dans les efforts plus larges de l’Érythrée pour renforcer la résilience rurale, améliorer la nutrition et réduire la pauvreté.
Hamed Meskel, un agriculteur bénéficiant du barrage d’Aderde dans la région nord, pratiquait l’irrigation à petite échelle avec une quantité d’eau limitée avant l’avènement du projet.
« Les choses s’aggravaient lentement car les puits de la région s’asséchaient. J’ai été contraint d’arrêter les cultures, mais j’ai repris. Grâce à la construction de ce barrage, l’eau est maintenant disponible », se félicite Hamed Meskel.
Fier de ses récoltes semestrielles de légumes, de fruits et de fourrage, qui ont augmenté d’environ 30 % par unité de surface, la ferme de Hamed Meskel sert également de parcelle de démonstration pour près de 350 autres ménages agricoles de la région.
Environ 73 % des Érythréens dépendent de l’agriculture et de ses domaines connexes pour leurs revenus et leur emploi.
Selon Kenneth Onyango, responsable des programmes nationaux au bureau de liaison de la Banque africaine de développement en Érythrée, « ce projet a immensément contribué à l’expansion de l’agriculture et des opportunités agro-industrielles dans les zones rurales de l’Érythrée comme moyen d’améliorer les moyens de subsistance des populations rurales et de développement économique ».
Le projet, a-t-il ajouté, est structuré autour de la participation des communautés, ce qui a permis d’atteindre les objectifs plus tôt que prévu. « Les communautés obtiennent des résultats et nous constatons que les changements dans les moyens de subsistance se traduisent par une adoption plus large de l’agriculture comme source de revenus pour de nombreux ménages dans les communautés ciblées », a souligné M. Onyango.
Le programme, qui en est à sa cinquième phase, devrait se poursuivre jusqu’en décembre 2026.
Sur le terrain, l’eau a apporté plus que de la nourriture. Les communautés acquièrent également un plus grand sentiment de sécurité dans un climat changeant. L’espoir a également pris racine.
« Nous sommes très satisfaits de cette initiative, qui a permis d’améliorer les moyens de subsistance de la communauté, conformément au plan stratégique quinquennal du ministère de l’Agriculture », a déclaré Hadgu Gebrendrias, coordinateur du programme. Il a ajouté que la construction des 98 barrages en maçonnerie, à ce jour, a encouragé la construction de nouvelles structures de conservation des sols et de l’eau sur plus de 9 800 hectares en amont des barrages dans les six régions de l’Érythrée au cours des cinq dernières années.
« Ces infrastructures ont contribué de manière significative à renforcer la résistance à la sécheresse, à améliorer les moyens de subsistance durables et à promouvoir la sécurité alimentaire et nutritionnelle, en particulier parmi les communautés pastorales et agro-pastorales d’Érythrée », a souligné M. Gebrendrias.
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